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~ Mémoires d'outre Monde ~
1ère chapitre (début)

 

 

Du plus vieux temps que je me souvienne, la brume était limpide, l’herbe verdoyante et grasse, les forêts étendues de plénitude, les Hommes plutôt en paix avec eux-mêmes. Bien que le temps, je ne puisse le compter.

 

C’est des Hommes écrivains et d’un scribe nommé Idril Cuthalion que vous êtes en mesure de lire mon histoire.

 

Je vécus très, très longuement parmi les arbres d’un endroit nommé Holtasoley par les Hommes. Cet endroit, je le sus bien plus tard était quelque part sur une île intitulée Ismanlada. Du plus loin que je puisse vous parler, j’étais seule sans l’être. J’entendais les chants de mes semblables aller et venir, proches ou éloignés, chuintement de feuilles ou d’eau dans mon esprit, rassurant si nécessaire, amusés par leurs facéties, mélancoliques ou effrayés.

 

Quelquefois je percevais les pas des Hommes sur les sentiers, le son de leur mots sans que j ‘en comprenne le sens. Ces gens-là ne m’inquiétaient pas, bien que je sentais l’extrême nécessité de m’en méfier, de ne pas les approcher, de ne surtout pas me laisser voir d’eux.

 

Il vint un jour, comme on dit, où je fis une étrange rencontre. Je ne m’attendais à rien de particulier de mon existence. Le croisement de lumières scintillantes m’emplissait de joie. Les parfums des fleurs et des herbes me nourrissaient grandement. Je voyais l’eau couler et les poissons jouer à sauter par-dessus les cailloux. Je m’amusais des oiseaux qui folâtraient  avec le vent. Je pourrais même dire maintenant, qu’ils surfaient avec les vents venus du large.

 

Non vraiment, je ne m’attendais pas à rencontrer un être qui m’apparut très grand, fin, ressemblant à ce qu’on m’a dit aux Hommes mais n’en étant pas. Turgon se nomma-t-il en me gratifiant d’un regard intensément bleu et doux. Il passa son élégante main sur mon être tout fluide, m’appelant « Nienna-Tiwele », me donnant ainsi l’apparence d’un être vivant, fait de chair et d’os. « Ma fille » dit-il tout empreint de fierté et de mélancolie. Il me tendit un bol chaud où flottaient plusieurs ingrédients aux senteurs agréables. « Bois ceci » Je pris le bol en découvrant mes bras et mes mains en action, je bus d’instinct, comme si j’avais toujours su, bien que ce fut tout à fait nouveau pour moi. « j’ai beaucoup de choses à t’apprendre car les temps de solitude sont révolus pour nous, peuple de l’air ! Il te faut devenir forte ! » A chacune de ses paroles Turgon, mon père, transmettait par images ses pensées, ainsi j’apprenais. Je compris qu’il attendait de moi que je sache toutes les choses qu’un être de lumière et d’air devenu de chair se devait de connaître et savoir-faire. Je pris conscience des nuits (courtes de l’été) et des jours qui se succèdent, des lunes qui s’accroissent et qui décroissent dans le ciel étoilé. Je sus ainsi qu’il me fallut bien des lunes pleines pour maîtriser totalement l’Art de tirer à l’arc. Et quand ce fut le cas, notre marche incessante commença.

 

 

 

 

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